Dossier Recruteurs : L'interim et le BTP au sortir de la crise

Entretiens avec Martial Canuet, responsable interim BTP chez Vediorbis, et Cédric Brault, responsable second oeuvre finitions chez Randstat.

" Le ralentissement du recrutement d'intérimaires dans le BTP reste mesuré "

Si la crise ralentit légèrement le rythme des recrutements d'intérimaires dans le bâtiment et les travaux publics, Martial Canuet, responsable emploi intérimaires chez Vediorbis dans la branche BTP, considère que ce phénomène touche les nombreux acteurs du secteur de manière sensiblement différente. Retour sur son analyse.



Quel constat faites-vous des répercussions de la crise actuelle sur le marché de l'intérim dans le BTP ?

Notre ressenti est en demi-teinte. Bien sûr, les offres d'emploi intérimaires se font plus rares : par rapport à l'année dernière, on constate une baisse de 10% dans le BTP. Pourtant, ce ralentissement du recrutement est mesuré. En effet, les grosses entreprises et leurs chantiers restent en activité, elles recrutent toujours au même niveau qu'avant la crise. En revanche, ce sont les petites structures qui en pâtissent le plus. Un constat qui n'est d'ailleurs pas propre au BTP.

Pour l'instant, nous n'observons pas de hausse significative des demandeurs d'emploi, suite à d'éventuels licenciements dans le secteur. Mais les statisticiens prévoient une hausse du chômage dans les années à venir... Ainsi, même si la situation est encore relativement bonne, nous restons vigilants quant aux futures répercussions structurelles de cette crise.

Pensez-vous que la baisse de l'intérim annonce une baisse générale de l'emploi dans le BTP ?

Il est certain qu'actuellement le secteur du BTP n'est pas sous son meilleur jour. En effet, la crise financière n'encourage pas les banques à faire de crédit, et pour que les entreprises du BTP démarrent des chantiers, elles ont besoin de ces crédits.

Sans liquidité, les employeurs réduisent leur activité et donc leur recrutement. Les emplois en CDD et CDI, en parallèle des intérimaires, sont par conséquent également touchés depuis quelques semaines.

Quels postes ou métiers sont aujourd'hui les plus concernés ?

Tous les types de postes sont touchés, mais certains de manière plus prononcée que d'autres : par exemple, nous constatons que les professionnels de l'encadrement souffrent moins de la crise.

Nous avons également remarqué que les travaux publics avaient davantage revu à la baisse leurs perspectives d'embauche : la FNTP a notamment annoncé dans ses derniers sondages une baisse de la recherche de main d'oeuvre intérimaire.

Comment faites-vous face à ce phénomène ?

Devant de tels enjeux, il est indispensable d'être au plus près des recruteurs et décideurs. Nous sommes donc actuellement en contact constant avec nos clients et nous prenons davantage de temps sur chaque cas, pour répondre au mieux aux attentes de ces entreprises. En conséquence, nous mettons en place une solide relation clients.

Depuis trois ans, quelles ont été les évolutions de l'intérim dans le secteur du bâtiment ?

Depuis 2005, le secteur du BTP était dans une tendance très positive en termes de recrutement d'intérimaires. Le BTP tirait l'économie nationale vers le haut.

En revanche, il est clair que l'année 2009 va être plus complexe, mais nous prévoyons un redémarrage de l'activité du secteur dès l'année 2010. Et les recrutements d'intérimaires devraient suivre également ce retournement de tendance.

Quels types d'entreprises du BTP font le plus appel à vous ?

Tous les types de structures. Les grosses entreprises ont leurs propres responsables RH, les PME ou les artisans sont plus généralistes. Ces derniers sont la plupart du temps débordés, et encore plus aujourd'hui du fait de la crise.

Nous leur mettons à disposition une expertise en ressources humaines ainsi qu'une logique de réseau : en effet, nous avons plus de 100 agences spécialisées dans toute la France, avec 400 collaborateurs permanents qui travaillent en commun, pour donner à nos clients les meilleures réponses à leurs problématiques de recrutement.

Notre palette de services RH est, par ailleurs, diverse : conseil en recrutement, formation, sécurité et santé au travail ou encore outils et services en ingénierie RH.

L'intérim est-il un choix pour vos candidats dans le BTP ?

Pour la plupart, oui. Nous collaborons, en effet, avec des candidats très volontaires : pour eux, c'est plus un choix de recourir à l'emploi intérimaire qu'une nécessité. Et ils ont raison : en effet, les recruteurs dans le secteur du BTP ont toujours été nombreux et, je pense, le seront encore pour longtemps, malgré cette période de ralentissement.




" Les grandes entreprises dans la construction de logements neufs sont les plus affectées ", Cédric Braud, responsable du développement de l'activité finition de Randstad

Chez Randstad, les experts de l'intérim se préparent à une année 2009 difficile dans la branche du BTP, comme nous l'explique Cédric Braud, responsable du développement de l'activité finition.


Que représente le BTP chez Randstad ?

En France, Randstad possède 112 agences spécialisées dans le BTP. Nous évoluons dans trois secteurs différents : le gros oeuvre, les travaux publics et le second oeuvre. Ce dernier est divisé en deux domaines, d'un coté l'électricité et la plomberie, de l'autre la finition (isolation, aménagement...). Au total, le BTP représente environ 20 % de l'activité de Randstad.

Quels sont les effets de la crise sur l'intérim dans le BTP ?

L'intérim en général est à la baisse et, bien sûr, le BTP n'est pas épargné. D'après une étude du CREDOC, le nombre d'intérimaires en mission en France, quelque soit le secteur, a chuté de 10 % en septembre par rapport au même mois de l'année dernière. Chez Randstad, on remarque une baisse de 6 % du nombre de personnes qui travaillent pour nous dans la construction.

Quels secteurs sont les plus touchés ?

D'après nos observations, les travaux publics et le gros oeuvre sont les premiers touchés. On y constate une forte diminution des projets. Les grandes entreprises dans la construction de logements neufs sont sûrement les plus affectées, ou vont l'être prochainement.

Celles qui construisent de gros ensembles, comme des résidences, auront des difficultés à trouver des commandes et, surtout, à entretenir les chantiers en cours. Au niveau des métiers, je pense que l'avenir paraît plutôt sombre pour les métiers de la maçonnerie.

Quels sont, au contraire, les moins impactés ?

Le second oeuvre et la rénovation ne devraient pas être sévèrement touchés. Les domaines liés aux économies d'énergies et au développement durable comme l'isolation, l'électricité ou encore la plomberie pourraient bénéficier, quant à eux, du dynamisme lié au Grenelle de l'Environnement.

En effet, ces nouvelles réglementations exigent des rénovations et des réhabilitations des anciennes structures.

L'embauche en général dans le BTP va-t-elle diminuer, à l'image de l'intérim ?

Dans tous les secteurs, dès que le marché du travail ralentit, les travailleurs temporaires sont les premiers touchés. Cela ne signifie pas que l'emploi est en péril pour le moment dans le BTP, car les grosses entreprises continuent à recruter des employés en CDD ou CDI.