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Pendant les mois de juin et juillet 1778 les habitants de Baume les Dames, petite ville de Franche-Comté eurent l'honneur d'assister à un événement considérable pour l'avenir du monde :

ce fut le lancement de l'ancêtre du steamer, le premier bateau à vapeur.
Le petit pyroscaphe entièrement construit par le jeune Claude Dorothée de Jouffroy d'Abbans réussit à remonter le cours du Doubs sur une petite distance, sans le secours de voiles, ni de rames, mû seulement par un dispositif utilisant pour la première fois la force de la vapeur.

L'expérience fut répétée à plusieurs reprises.
Que ce "ruisseau" de Franche-Comté, ainsi que Fulton appelait dédaigneusement nos cours d'eau, fut le point de départ d'une révolution dans la navigation maritime et non le bord des océans ou l'un des grands fleuves d'Amérique, a bien de quoi surprendre.

Cependant, l'esprit souffle où il veut, et il faut reconnaître qu'en matière de mécanique les Francs-Comtois montraient des aptitudes :
n'ont-ils pas inventé le vernier, la montre ? Mi-paysans, mi-ouvriers, isolés dans leurs montagnes, ils devaient faire preuve d'ingéniosité, être capables de réparer leurs métiers, d'imaginer des outils, de forger un coq pour leur clocher, de tailler dans la pierre et le bois.
Et tous ces travaux, leurs mains robustes les faisaient avec application, patience, opiniâtreté, dans un grand besoin de perfection.

Dans la vallée, le long des cours d'eau coupés de chutes, les usines retentissaient du fracas des marteaux ; les forges de Franche-Comté étaient puissantes, celles de Quingey appartenaient au Roi de France.
Là, des hommes au cerveau ingénieux et aux mains habiles pouvaient trouver maintes occasions de perfectionner leurs outils et d'inventer des machines devant faciliter le labeur humain.